Mon pas de côté au coeur des canopées

Alors que la pause estivale s’annonçait, j’étais confrontée à ce dilemme commun à tous les créateurs d’entreprise. Comment justifier des congés en phase d’amorçage du business et tant que ton business model n’est pas éprouvé. Me voilà prise à mon propre piège de l’urgence du business et de sa viabilité ! Alors même que je vous parle de la nécessité de faire des #pasdecôté régulièrement face aux pressions multiples dans le monde de l’entreprise et de l’entrepreneuriat. Un peu de négociation avec ma voie de la raison toujours là pour me remettre sur les rails des conventions (blabla…). Et victoire haut la main du lâcher prise que je commence à sérieusement maîtriser. Finalement, je m’autorisais un break ! L’occasion de prendre un peu de recul sur mes premiers pas d’entrepreneure, changer de regard, recharger mes batteries, me recentrer pour mieux aborder la rentrée et la suite.   

Un #pasdecôté perché

Alors j’ai fait mon #pasdecôté un peu perché, histoire de vraiment prendre de la hauteur ;-). Petit indice : Canopsia, canopée ! A l’heure où l’appel des arbres se fait entendre de toute part et moi-même d’inviter à la (re-)connexion avec la nature, je me suis laissée guider par l’envie de ressentir l’âme de ces forêts primaires et des canopées. Francis Hallé, botaniste spécialiste des forêts tropicales, nous dit d’elles que « rien n’est plus beau » (1). Mais voilà, les forêts primaires se font plus en plus rares, menacées d’extinction par les exactions de l’Homme et pourtant indispensables à notre survie, crient ces scientifiques. Il n’en existe d’ailleurs plus en Europe. Elles se trouvent encore dans les zones tropicales et peu permettent l’accès aux canopées. Alors cap sur le Costa Rica , ce petit pays de 51 000 km2 majoritairement constitué de forêts tropicales. Plus d’un 1/3 sont protégées par une politique environnementale engagée. Ce pays accueille à lui seul 5% des espèces vivantes recensées au niveau mondial. 

Le paresseux

Un été d’urgence

Me voilà donc partie pour une immersion au coeur des forêts primaires tropicales découvertes en Amazonie il y a plus de 20 ans sans la même conscience écologique et certainement pas la même urgence non plus ! Une urgence qui a pris cet été une autre tonalité. L’été le plus chaud jamais enregistré. Un dérèglement climatique qui ne peut plus faire l’objet de contestation. Des thèses de collapsologie ici et là qui nous annoncent un effondrement imminent, une prochaine crise alimentaire pour certains et la menace de l’extinction de l’espèce humaine pour d’autres. Un tableau bien noir qui comporte certainement une part de vérité et espérons-le, permet une prise de conscience individuelle et collective de devoir agir autrement.

La lumière de l’espoir

Profondément optimiste, j’ai envie d’amener ma touche de lumière dans cette noirceur en partageant modestement la magie de cette immersion au coeur des forêts du Costa Rica. Avant tout une immense leçon d’humilité devant la grandeur et la beauté de cette nature originelle à laquelle l’Homme n’a pas mis son coup de serpe. Des ambiances fantastiques, quasi surréalistes des légendes sylvestres où l’on trouve une flore parfois préhistorique et unique. Comme ce « tapir fruit tree » ou Parmentiera Valerii dont les fleurs et fruits accrochés au tronc relèvent d’une sublime composition artistique. Un monde qui nous a précédé et nous survivra de toute évidence. Une réalité qui impose le respect. Elle nous remet à notre place dans la hiérarchie des vivants si toutefois nous avions encore cette conviction héritée des Grecs anciens, d’être supérieurs au monde végétal et animal. 

Parmentiera Valerii

Des contes vivants à foison

Des racines que l’on devine tentaculaires, aux cimes, cet océan de verdure, ou canopée, que l’on peut côtoyer grâce à des ponts suspendus, se dessine un écosystème structuré d’une intelligence incroyable, complexe, foisonnant de biodiversité. Les histoires fabuleuses pour chacun de ces arbres et leur vie partagée avec la faune, contées par des guides remarquables (ceux que j’ai eu la chance de rencontrer). Un vacarme de vies dissimulées ici et là, la faune ayant appris à se fondre dans cette jungle pour se protéger des prédateurs. C’est pas à pas, avec tous les sens en éveil et une attention extrême de l’instant présent, que l’on avance dans cet univers inhabituel qui peut vite devenir oppressant et hostile. Des émotions fortes et une puissante énergie palpable pour ceux qui y déambulent le coeur ouvert.

L’authenticité d’improbables rencontres

Et ce cadeau précieux que fut cette rencontre improbable avec Gerardo, indigène de la tribu des Huetares, un homme-médecine qui nous a amené moi et ma fille dans sa « montana », nous expliquant tous ces arbres et plantes et leurs vertus médicinales. Un capital immatériel ancestral transmis par sa grand-mère qui connaissait plus de 1000 plantes, la majorité d’ailleurs non répertoriées scientifiquement. Lui en connait 400 et s’interroge sur la transmission de son savoir. Il ne sait ni lire ni écrire. N’est-ce pas là une partie du patrimoine mondial de l’Humanité qui devrait être protégé tout comme ces forêts ici et là que l’on sait menacées ? 

Gerardo, indigène de la tribu des Huetares

Des expéditions d’éveil en canopées

Un monde bien vivant qui n’a pas besoin de l’homme mais dont l’homme a besoin pour respirer, se soigner, s’apaiser, se nourrir, vivre tout simplement. Francis Hallé dans une interview à Radio Canada (2) en juin 2018 confiait son inquiétude grandissante prédisant que le jour où nous aurons du mal à respirer est proche. Son rêve est de pouvoir emmener des politiques et chefs d’entreprises la-haut pour prendre de la hauteur et éveiller les consciences. Quelle belle ambition. Il est vrai que l’on en revient transformé. Alors à quelques jours d’un G7, et d’une consultation citoyenne sur le climat en France, puisse sa sagesse (et celle d’autres scientifiques) être entendue et son rêve prendre forme.   

Un retour vers l’essentiel

Moi, je reprends mon business là où je l’avais laissé, au stade de la semence 😉 me rappelant les sages propos de Lao Tseu « La nature fait les choses sans se presser, et pourtant tout est accompli ». Une certitude, je reviens chargée d’une précieuse énergie, avec une conscience plus éveillée et une détermination décuplée à poursuivre ce nouveau chemin. Inviter la nature au coeur des enjeux des dirigeants et de l’entreprise (leadership, performance, transformation, santé, engagement…). Entamer un programme de formation à la sylvothérapie pour ouvrir de nouveaux horizons. Et toujours laisser une place pour l’inattendu…

Belle rentrée et à très vite pour un #pasdecôté. 

Florence Karras

(1) https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/07/13/francis-halle-rien-n-est-plus-beau-qu-une-foret-primaire

(2) https://ici.radio-canada.ca/premiere/emissions/medium-large/segments/entrevue/77017/francis-halle-plantes-botanique-vegetaux-avenir-forets-arbres

Crédit photos : Florence Karras

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