Et si l’expérience Nature permettait d’ensemencer le monde d’après

Avec cette crise du Covid19, nous avons définitivement plongé dans un monde incertain et complexe  qui a accentué les fractures économiques, écologiques et sociales. Ce monde d’après, qui reste à ensemencer, ne pourra pas se faire sur les terres épuisées du monde d’avant. Il va falloir apaiser, réparer, et créer les conditions de la fertilisation de nouveaux récits. Des récits individuels et collectifs qui intègrent toutes les parties prenantes sans exception et convergent vers un équilibre entre performance économique et impact sociétal.  

Après de lourds investissements sur le ré-enchantement de l’expérience client et plus modestement sur l’expérience collaborateur par symétrie des attentions, le temps est peut-être venu pour chacun.e de nous (clients, collaborateurs, citoyens) et les entreprises en particulier d’explorer le champ de l’expérience Nature. Car la Nature est une partie prenante vivante dont il n’est plus question d’occulter l’existence, l’état, le rôle, nos interdépendances et nos impacts sur elle. L’expérience Nature n’est pas nouvelle. Probablement la plus ancienne des expériences, qu’en tant qu’humains nous ayons vécu. Un besoin biologiquement intégré à notre développement en tant qu’individus que nous avons hélas réprimé. L’extinction de cette expérience Homme-Nature depuis quelques décennies est une urgence sanitaire, elle aussi, à considérer car elle a des implications majeures et prouvées d’ordre psychologique, social et environnemental. 

Alors si les expériences clients et collaborateurs sont devenues des leviers stratégiques de business, de fidélisation et de marque employeur ces dernières années, il y a fort à parier que l’expérience Nature va s’imposer dans les mois qui viennent comme ce maillon manquant fédérateur des intérêts convergents des différentes parties prenantes. Ce lien inné à la Nature altéré que nous devons réparer pour faire rimer écologie intérieure et écologie extérieure au service d’une écologie globale.

L’expérience Nature qui prend soin du capital humain 

Pour préparer ce terreau du monde d’après, il sera indispensable au moment de rassembler physiquement les collaborateurs de créer un espace d’expression pour libérer la parole, apaiser le stress émergé ou amplifié pendant ce confinement, évacuer les tensions, les non-dits mais aussi témoigner des apports positifs. Un temps indispensable donné à l’expression de l’expérience de chacun pour recréer le collectif complètement déstructuré et définir un nouveau pacte du travailler ensemble autrement. Ce qui vaut pour les salariés, s’appliquent également aux managers et équipes de direction, pas moins vulnérables et exposés à des enjeux inédits et responsabilités majeures.

Pour diriger et manager dans ce nouveau monde il sera indispensable de développer tout son potentiel émotionnel, de sensibilité, de ressenti, d’intuition, d’écoute profonde pour percevoir l’invisible, entendre les signaux faibles, les informations indispensables à notre survie dans un monde définitivement incertain. Rééduquer les sens atrophiés par un trop plein de tout. Mettre le mental en veille pour se connecter à son coeur. Se reconnecter à sa naturalité. Prendre soin de soi et développer son écologie intérieure sera une nécessité. 

Le meilleur des terrains pour prendre soin de son écologie intérieure est d’être en contact et interaction avec la nature. Les études sont nombreuses aujourd’hui pour confirmer les bienfaits multiples d’une reconnexion à la nature et des métiers nouveaux émergent autour de l’écothérapie, la sylvothérapie, l’écopsychologie. De la diminution du stress au renforcement du système immunitaire, du développement de l’attention à la stimulation de la créativité, du réveil des sens à l’éveil des consciences écologiques, les immersions guidées au coeur de la nature sont des propositions innovantes qui répondent aux enjeux du moment. Elles devraient s’inviter rapidement dans les programmes de QVT et figurer parmi les solutions d’accompagnement des ressources humaines des entreprises.

L’expérience Nature qui enseigne 

De tous les temps la nature a fasciné, inspiré, guidé. Hélas beaucoup moins depuis quelques décennies car nous sommes devenus une espèces urbaine techno-stressée, déracinée de la Terre perdant notre naturalité et avec, ce sentiment d’appartenance à un tout. 

C’est une triste chose de penser que la nature parle et que le genre humain n’écoute pas. Victor Hugo

La forêt pour ne parler que d’elle, est un théâtre social vivant riche d’enseignements et d’interactions possibles pour s’inspirer, réfléchir, interagir, réparer, travailler sur le collectif, le management, l’innovation, la diversité, le rapport au temps, les cycles, les interdépendances, la résilience, l’humilité… . Les arbres sont à la forêt ce que les collaborateurs sont à l’entreprise. Les analogies entre ces deux écosystèmes vivants sont instructives pour peu que l’on accepte de sortir des standards d’accompagnement et de s’ouvrir à un nouveau champ d’expériences. 

Peut-être serait-il temps de revisiter le séminaire au vert, celui qui n’est autre qu’une délocalisation d’une équipe dans un lieu aéré et verdoyant pour les pauses récréatives. Et si la Nature était partie prenante des séminaires et team building ? Si nous construisions les séminaires autour et avec la Nature. Pas besoin d’une nature sauvage et éloignée. Tout est là dans les lieux habituels, il suffit juste de s’ouvrir à une autre réalité, de changer de regard et laisser émerger un nouveau champ des possibles. 

L’expérience Nature qui devient lieu d’interactions des parties prenantes

Quel avenir pour le bureau ? Allons-nous vers 100% de télétravail ? Exode urbain ? 68 % des cadres seraient prêts à partir vivre au vert selon une étude récente de Cadremploi. Le sujet est largement débattu depuis quelques semaines et le curseur reste à trouver dans un mix de formules de lieux de travail qui permettent de préserver un confort gagné dans le télétravail avec des impacts positifs sur l’environnement et le besoin vital de l’animal social que nous sommes de nous retrouver physiquement pour interagir, brainstormer, innover… . Des concepts à inventer entre des bureaux très urbains allégés et végétalisés, des tiers lieux urbains ou péri-urbains déjà existants et des solutions nouvelles comme des éco-lieux par exemple qui poussent ici et là et qui pourraient être davantage investis pas les entreprises.  

Imaginons un éco-lieu d’entreprise implanté dans un environnement naturel idéalement en relation avec l’écosystème impacté par sa chaîne de valeur afin d’être plus en conscience de ses impacts sur l’environnement et la biodiversité. Un lieu d’accueil et de séjour des collaborateurs mais aussi des parties prenantes de l’entreprise. Un lieu de recherche et d’expérimentation, de ressourcement, d’inspiration, d’innovation au plus proche de la nature. Un projet qui contribuerait à améliorer l’expérience collaborateur, satisfaire les attentes de clients toujours plus exigeants sur l’engagement des marques, accélérer et incarner la transition écologique.

Voilà quelques idées pour des entreprises et leurs dirigeants qui voudraient devenir ces néo-jardiniers du Care pour ensemencer le monde d’après.

Florence Karras

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